Mémoires sur les Grands-Jours d’Auvergne de Esprit Fléchier (1665)

Grand orateur de la Contre-Réforme, ecclésiastique et magistrat, Esprit Séguier présida en 1661-1662 les "Grands-jours d'Auvergne" dont il rédigea les Mémoires (lien Gallica).

Ce tribunal d’exception, institué par Louis XIV, devait mettre fin aux atrocités des féodaux sur la population dans la province.

C’est-à-dire prévenir une insurrection de la province, déjà fort secouée par les protestations jansénistes (Lettres provinciales de Blaise Pascal, écrites à Clermont en 1655-1657, puis répandues en trainée de poudre).

C’est d’ailleurs la même année des "Grands-Jours" (1662) que meurt Blaise Pascal à Paris, âgé de 39 ans, dans des conditions finalement assez suspectes.

Fait exceptionnel, plus de 200 condamnations à mort furent prononcées. Par pendaison, comme marque d’infamie : autre trait d’exception, s’agissant de nobles, non destinés à la corde.

Très peu furent exécutées, comme les hobereaux condamnés purent se cacher à temps ou fuir à l’étranger : ils furent donc pendus en effigie.

Plus tard, Esprit Fléchier, devenu évêque en Languedoc, eut maille à partir avec les "inspirés et fanatiques" protestants des Cévennes.

Il dut s'opposer directement à un autre "Esprit" : Esprit Séguier, principal "prophète" des paysans insurgés. Le parallèle est trop beau pour être passé sous silence.

Il renvoie à la la fameuse affaire des "prophètes cévenols" qui agita l’Angleterre au début du XVIII° siècle, de lord Shaftesbury (Lettre sur l’enthousiasme, 1708) à David Hume (Superstition et enthousiasme, 1741).

La statue d’Esprit Fléchier peut toujours se voir à Paris place Saint-Sulpice, sur la fontaine dite des "quatre prédicateurs" du Grand Siècle (avec celles de Bossuet, Fenelon et Massillon).

Sur l’intérêt de cette lecture, cf. Jacques Lacan : Séminaire VII : L’éthique de la psychanalyse, Seuil, 1986, p. 235 (Séance du 30 mars 1960 : "La jouissance de la transgression").

"Il n’y a pas du tout à cacher la face que j’appellerai réaliste des atrocités de Sade. Assurément leur caractère développé, insistant, démesuré saute aux yeux et contribue, par je ne sais quel défi, à la vraisemblance, à faire entrer l’idée légitime de je ne sais quelle ironie de ce discours. Il n’en reste pas moins que les choses dont il s’agit s’étalent dans Suétone, dans Dion Cassius, dans quelques autres, et lisez les Grands jours d’Auvergne d’Esprit Fléchier, pour apprendre ce qu’à l’orée du XVII siècle un grand seigneur pouvait se permettre avec ses paysans."

X p

Sur le charivari à la fin du procès et l'ancienne tradition du "royaume des fous" dans la ville de Clermont, voir l'extrait ci-joint.

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