Collège clinique de Clermont / Collège international de philosophe / Ecole normale supérieure / UMR 8230 du CNRS (Centre Jean Pépin).
Collège clinique de Clermont / Collège international de philosophe / Ecole normale supérieure / UMR 8230 du CNRS (Centre Jean Pépin).
Sur les modillons romans
Clément, Nadia, Thibaut,
tant que j'y pense, un premier mot en vitesse pour vous passer une page bien faite qui me paraît belle, aussi très utile pour le site : modillons romans.
Ce qui m'est apparu dans toute son évidence, c'est que :
1. Les modillons figure au yeux de tous les visages des démons c'est-à-dire des passions à adorer en soi / ou bien stigmatiser, en soi ou chez les autres (vertus et folies positives, folies négative : vices ou péchés).
2. "Fait social total" (Mauss), l'Eglise de l'an mil est aussi, outre un sanctuaire de sagesse (philosophie, médecine), une cour judiciaire, une halle commerciale (contrats et serments) et une salle de spectacle (mystères et soties) ;
3. Par suite : elle figure sur ses murs et colonnes les masques et caractères des hommes, au moment où les fidèles viennent justement porter leur masque en public (et aussi chercher leur masque secret) ;
4. Aussi, elle fonctionne comme une immense image machine à regard, une machine à visage (Deleuze) :
= tout comme les temples antiques, elle exhibe les visages secrets des gens qui s'y rendent, par suite renvoie les humains aux démons et à leurs démons (dieux anciens, allégorie des vices et vertus, êtres et figures mythologiques) ;
= elle montre aux yeux du peuple ces masques (identificatoires, officiels ou bien forclos, maudits) : à chacun de s'y reconnaître, sur deux faces (publique et cachée, comme d'y reconnaître les autres (sur deux faces aussi) ;
= elle propose à chaque rite un réglage général des hommes sur leurs (deux) visages : bien sûr, les pratiques de tous dans le cercle de dévotion (identifié à la société tout entière = > équation clunisienne Eglise = Société) ;
5. En termes plus historiques (idéologiques, moraux, politiques) : elle montre sur ses murs et colonnes les dieux anciens d'une population encore aux 3/4 chamanique (païenne,polythéiste) et qu'il s'agit de dresser :
- elle figure les dieux et démons anciens, sur un mode double (ambigu, ambivalent) : soit pour rejeter ces démons, soit pour les absorber ;
- elle convoque le for intérieur (la conscience intime de chacun), dans le contexte des ses rites publics (liturgies, prêche, communion, prières, sacrements) ou secret (confession auriculaire, espionnage, délation et surveillance) ;
- ses murs, fresques et chapiteaux, sont une immense leçon de morale, mais aussi de mémoire et de sagesse qui souvent remonte à la haute antiquité ou au néolithique ;
6. Ce que me dit à tout instant l'église du village : mes démons et folies me regardent depuis les murs.
= elle me montre la "comédie humaine" (Balzac) qui est aussi une comédie divine (Dante, Virgile) :
7. Et ce qu'elle me suggère aussi : comme ces démons habitent la maison commune, pour moi et chacun, l'église est aussi maison privée, la maison de mes / de ses démons (qui ont aussi des interfaces, des passions partagées) ;
= par suite, pour ego : "ces démons, je peux les habiter à mon tour et les partager avec les autres" (=> sens de la "communio", comme mystère et sacrement) ;
= donc, pour ego : ma folie est à la maison, ma folie est de la maison (commune, habitable), et pas folie sauvage, aveugle ou muette : les démons la peuplent et y tiennent conversation entre eux (comme les hommes juste sous les murs) :
= bref pour ego : ma folie (animale, divine) est aussi humaine d'une humanité commune = si elle est consacracable, ma folie est sociale et civique (je suis citoyen, je puis être héros et démonique envers moi, comme envers les autres).
= "je suis sauvé"
En tout cas, c'est ce que j'entends dans ces figures ("naïves" = !!) qui regardaient naïvement les hommes en miroir.
A très bientôt
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